Sans issue
Il
y a des jours sereins, et des matins cruels où un filet
d’angoisse perce, et vient mettre fin à cette
paix intérieure qu’on croyait acquise. Dans ces
moments, le défi est bel et bien de rester ouvert au
monde.
J’étais
dans un de ces matins, le regard vague, engoncé dans
mon mal-être, remontant une petite rue piétonne.
Soudain la cascade d’un rire me ramena au présent.
L’enfant de 3 ans s’enfuyait avec un papa à
ses trousses. L’homme avait du lui promettre les pires
tourments, comme le supplice d’une attaque de chatouilles,
ou une dévoration de bisous : dans sa course, le tout
petit riait dans un mélange de délice et de
terreur.
J’ai
suivi le duo sur une centaine de mètres, en concentrant
mon attention sur ce petit bonhomme, et son énergie
quasi-désespérée à fuir, à
relever le défi, avec au cœur la certitude d’une
échappatoire possible.
Mais
bien sûr son père a fini par l’attraper.
Les
choses ne sont-elles pas toujours jouées d’avance
?
Et
si nous traversions la vie avec ce sourire aux lèvres,
malgré la certitude d’être la proie de
quelque chose, toujours, puisque la mort nous rattrapera ?
Et si l’issue comptait moins que la course ?
J’ai
quitté le père et le fils. Avec en moi un filet
d’angoisse soudain tranché, et une conviction
nouvelle, supplémentaire, renforcée, à
vivre.
«
Utilise tes jambes pour marcher, et le reste suivra. »