Lost in translation

Le cinéma a ceci de magique, que parfois, au détour d’une image, il nous ramène en nous-même, et que ce n’est plus le film d’un autre que nous découvrons, mais l’histoire de notre propre vie, là devant, différente bien sûr,
sous un autre prisme, mais tellement juste ; si chirurgicalement précise, comme l’incision discrète d’un scalpel qui, au demeurant, ne jure qu’à notre guérison, mais douloureuse tout de même ; si bien qu’on ferme les yeux un instant, et que derrière les tours de Tokyo apparaît une lande bretonne, des mots ressurgissent, des odeurs, des images défilent. D’où jaillit cette sensation de perte de repères ? Jusqu’au souvenir fugace des bras amis qui vous entourent au beau milieu du nulle part ; j’étais là à ce moment, profondément heureux, bousculé, comme cet acteur égaré dans une mégalopole japonaise, et aujourd’hui dans cette salle de cinéma, des larmes jaillissent, dégoulinent jusqu’à mes lèvres, j’en goûte l’amertume salée, jusqu’à trinquer à la mémoire des vieilles histoires.
Demain matin, ne me demandez pas si j’ai aimé ce film. Ma seule certitude
sera qu’il est riche de ma propre vie.
Difficile donc, d’être juge et partie.