Hollywood chewing-gum
À
8 ans, je regardais les antiques westerns des années
1950. John Wayne tirait à vue sur les indiens, et il
avait sacrément raison, car on n’a pas idée
d’accueillir à coup de flèches les braves
gens qui passent paisiblement à côté de
chez vous. À 8 ans, ça m’allait bien,
les cavaliers hurlants qui tombaient comme des mouches ; les
guerriers emplumés qui succombaient d’un bon
coup de pistolet. J’applaudissais, et sautais de joie
dans le salon.
Cet
enthousiasme juvénile n’avait aucun équivalent
dans la vie réelle, car dans mon pays, bien rare sont
les occasions de tuer des indiens. Nous autres français,
sommes si ennuyeux, pensais-je, et si peu chanceux, de n’avoir
un ennemi si cruel et si stupide, qu’il n’y ait
aucune question à se poser quand il s’agit de
l’éliminer.
Des
années plus tard, je découvrais les vérités
du général Custer, du massacre de Wounded Knee,
les 400 traités signés par le gouvernement américain,
et systématiquement violés ; les multiples guerres
de résistances indiennes, la destruction des bisons
des plaines par les chasseurs blancs. D’un coup les
méchants n’étaient plus les méchants,
et tout un pan de la féérie s’effondrait.
Ce n’était que le début, je n’avais
pas encore dressé la longue liste de ceux que mon pays,
La France, avait piétinés. L’Histoire
mastique longtemps ses cadavres avant de les recracher…
Dans
les salles de cinéma, le western continue. Le «
monde libre » combat désormais des glabres et
des barbus, des insurgés, des partisans, des terroristes.
Des énervés. N’ont-ils pas l’air
féroce, ces étrangers ? Leurs gestes brusques,
leurs cris, leurs langues barbares et leurs prières
d’un autre âge. Une stupidité évidente
à ne pas reconnaitre la supériorité politique
d’un régime démocratique. En face, des
héros, encore et toujours, pour sauver le monde.
Bang,
bang, bang.
Et
qui pour applaudir les John Wayne, si je ne suis plus là
?